

Guillaume Néry, champion d'apnée
Parus dans "Animer une équipe projet avec succès", H-P. Maders, Eyrolles, 2012
Le 5 juin 2011, je suis au départ du championnat du monde en individuel à Kalamata, en Grèce, et vais devenir champion du monde d'apnée en poids constant avec une profondeur de cent dix-sept mètres. La mer est agitée, je bois à tasse à deux reprises... Je sias cette performance possible, car nous l'avons décidé avec mes coéquipiers de l'équipe de France. c'est ainsi que nous procédons, même pour un championnat du monde individuel... De même, nous nous entraînons ensemble, sommes solidaires les uns des autrres... Quand je m'immerge, c'est toute l'équipe qui s'immerge avec moi. Je me focalise sur la performance à réaliser et non sur l'enjeu et m'enfonce dans le bleu puis dans le froid et le noir jusqu'à cent dix-sept mètres ; j'arrache la fiche correspondante et remonte à la surface. J'ai la meilleure performance et suis champion du monde, car les deux prétendants à cent dix-huit mètres ont échoué. Cette expérience illustre ce que j'ai appris avec mon mentor de l'école de Nice". Le groupe passe avant l'individu, car il apporte la sécurité, permet de se sentir bien et par là même autorise la performance individuelle.
Le 3 septembre 2008, je suis au départ de la première des trois éprueves du championnat du monde par équipes à Charm El-Cheikh (Egypte), l'épreuve reine, celle d'apnée en poids constant, ma spécialité. Avec une annonce à cent mètres de profondeur, la performance semble facile pour moi qui ai battu le reccord du monde en juillet dernier avec cent treize mètres ! Je suis en train de m'échauffer dans l'eau, la mer est agitée, je ne me sens pas bien, la pression est forte sur mes épaules. L'équipe compte sur moi, après tout, je suis champion du monde... Je m'immerge et très vite, j'ai la confirmation de mes inquiétudes : ça va être très dur. Très vite, mon ego et mon esprit d'équipe négocient et je décide de faire demi-tour à quatre-vingt-dix-huit mètres. deux petits mètres, ce n'est pas grand chose et en même temps c'est énorme, car je sais que je vais remonter en sécurité, sans syncope, prendre certes trois points de pénalités, mais engrenger quatre-vingt quinze points pour l'équipe de France. Mes performances dans les autres épreuves et celles de me coéquipiers feront le reste. L'équipe de France n'était pas la meilleure sur le papier, et d'autres équipes avaient des champions plus forts individuellement, comme la Nouvelle-Zélande ou le Danemark, mais parce qu'elles manquaient de cohésion entre leurs membres et encore moins de leader pour les canaliser, c'est l'équipe de France qui devient championne du monde. Cette expérience met en avant l'une de mes convictions : pour qu'une équipe gagne, ses membres doivent mettre leur ego de côté au profit de l'intéret collectif. Dans ce cas, même une équipe qui ne présente pas les meilleurs individuels peut gagner.
Sandrine Murbach, présidente de ABB & A, championne d'apnée
Paru dans l'ouvrage "Le métier d'auditeur et de contrôleur interne", H-P. Maders et J-L. Masselin, Eyrolles, 2013
Je pratique, depuis mon plus jeune âge, différents sports à risques. Cependant, l’apnée est celui dans lequel la connaissance du risque et sa gestion sont des éléments cruciaux.
Quelle que soit la discipline pratiquée en compétition, statique, dynamique ou profondeur, l’objectif est toujours d’atteindre sa propre limite, tenir le plus longtemps possible, nager le plus loin ou le plus profond possible…Si la limite est dépassée, la sanction est radicale, c’est la syncope. Et le risque, si les conditions de sécurité ne sont pas remplies, c’est la noyade.
Deux points sont donc déterminants dans la gestion de ce risque :
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Mettre en place un dispositif de sécurité pour prévenir les accidents, et intervenir le cas échéant : surveillance avec contrôle de la lucidité de l’athlète mais surtout des apnéistes (ou plongeurs) de sécurité ; la règle numéro 1 de l’apnée, en loisir, à l’entraînement et d’autant plus en compétition c’est « jamais d’apnées seul ».
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Se connaître parfaitement, connaître ses limites, physiques et mentales, et avoir une capacité à être à l’écoute de soi en permanence, pour savoir exactement où on en est, détecter ce qui est inhabituel, l’évaluer, l’intégrer dans sa performance pour la gérer au mieux.
En compétition en piscine par exemple, pour les épreuves d’apnée dynamique (parcours de la plus grande distance possible en apnée), la sécurité est assurée par 2 nageurs en surface qui nous suivent tout au long de notre performance. Au moindre signe de défaillance, ils interviennent. La présence de ces deux anges gardiens au-dessus de nos têtes et à nos côtés à la sortie de l’eau nous sécurise, il nous reste « juste » à nous concentrer pour sortir le meilleur de nous-même.
Sans ce dispositif de sécurité, sans cette garantie que le risque est maîtrisé, sans la sérénité inhérente, impossible de réaliser une performance maximale.
L’apnée est un sport complet et complexe : il est physique, technique et mental. Il impose, pour approcher ses limites sans jamais les dépasser, de se connaître parfaitement. Les capacités d’écoute de soi que l’on développe, de perception des sensations internes et externes, d’évaluation du niveau d’effort, de fatigue, de contrôle du corps et du mental, sont un formidable atout dans la vie sportive, mais aussi dans la vie personnelle et professionnelle.
Aussi à l’aise dans l’eau que nous puissions être, n’oublions jamais que les défaillances existent, tout comme les imprévus et les accidents. « Savoir pour prévoir, afin de pouvoir » disait Auguste Comte.